L’AMAP, bien plus qu’un panier ! Paroles d’amapien·nes et de paysan·nes

Des liens, des solidarités, une alimentation plus saine et équilibrée, le métier de paysan·ne mieux compris et rémunéré, moins de gaspillage et d’emballages, un environnement respecté… Et surtout une expérience de vie, personnelle et collective, un changement de repères et d’habitudes pour les amapien·nes comme pour les paysan·nes, chacun·e avec son cheminement propre.

Ce 1er article amorce un projet plus large de récolte de paroles d’amapien·nes et de paysan·nes sous différentes formes (écrits, podcasts, vidéos). La récolte est en cours et une rubrique sera dédiée à valoriser ces paroles multiples courant 2025.

Témoignage de Clothilde, maraîchère en Ile-de-France

Extrait du témoignage de Clothilde en introduction du rapport d’Étude sur la viabilité et la vivabilité du métier de maraîcher·ère biologique en AMAP en Ile-de-France (version 2024)

« Je suis maraîchère en AMAP et j’écris cet avant-propos depuis la maison de vacances d’une amapienne qui m’a invitée pendant la semaine de vacances que je ne pensais pas pouvoir prendre cette année. Je n’avais donc rien prévu et j’ai eu l’occasion de tisser des liens encore plus forts avec une personne que je vois déjà toutes les semaines depuis 6 ans. Être amapien·ne ou maraîcher·ère en AMAP est une aventure gustative parsemée de découvertes, de surprises et de partages de recettes inventives. Mais surtout, être maraîcher·ère en AMAP ou être amapien·ne c’est une aventure humaine, avec des productrices, des producteurs et un groupe d’amapien·ne·s qui soutiennent l’agriculture paysanne qu’elles et ils défendent : une agriculture qui respecte la nature, le climat, les humains, les animaux et les plantes tout en produisant une alimentation saine et de qualité.

Que l’on soit amapien·ne ou paysan·ne, nous nous engageons pour contribuer à faire avancer notre monde vers cet idéal commun et, un pas après l’autre, années après années le nombre d’AMAP, d’amapien·ne·s, de fermes en AMAP a augmenté pour se stabiliser ces dernières années autour de 370 groupes et presque 400 fermes en partenariat avec des AMAP d’Île-de-France.

Pour les 20 ans du réseau, nous avons mis à jour notre étude sur la viabilité et la vivabilité du métier de maraîcher bio en AMAP en Île de France. La viabilité économique nous permet de financer nos besoins primaires mais nous permet aussi d’avoir plus d’indépendance sur nos fermes et plus de possibilités de tester de nouvelles façons de produire vos bons légumes. La vivabilité nous permet tout simplement de tenir dans le temps dans un métier qui demande un temps de travail considérable, une astreinte permanente et qui nous place, en tant que paysan.ne, dans un décalage important avec le monde qui nous entoure.

Ces deux notions indissociables sont la raison d’être des AMAP : permettre aux paysan·ne·s de vivre de leur métier tout en vous permettant d’avoir un accès garanti à leurs productions. Parfois cependant, atteindre cet objectif n’est pas si simple, à cause de la météo, des paniers trop petits ou trop gros, des recrutements d’amapiens pas faciles, des scrupules des producteurs à augmenter les prix, des impossibilités des amapien·ne·s de prendre un risque financier dans un contexte économique tendu, etc.

Pour prendre un peu de recul sur tout ça et faire un nouveau bilan après celui de 2018, nous vous proposons de voyager dans des fermes aux typologies variées qui ont accepté de partager non seulement leurs chiffres mais encore leurs ressentis.

Ces maraîcher·ère·s ont fait des choix pour leurs fermes face à des contraintes différentes et variées et si l’ensemble de ces choix rend chaque ferme unique, nous avons effectué des regroupements qui permettent d’établir des comparaisons et de comprendre ce qui distingue et rassemble les différents modèles qui constituent notre paysage « Amagricole ». Ces modèles coexistent et se nourrissent mutuellement – nous n’avons pas LE modèle parfait, nous essayons chacun·es d’adopter des façons de faire qui nous correspondent. En revanche, ce qui nous rassemble sans exception, ce sont les AMAP ! »

Témoignage de Maud, ancienne administratrice du Réseau des AMAP Ile-de-France

Extrait du témoignage de Maud en introduction du rapport d’Étude sur la viabilité et la vivabilité du métier de maraîcher·ère biologique en AMAP en Ile-de-France (version 2018)

« Je suis membre d’un groupe AMAP depuis bientôt quinze ans et administratrice du réseau des AMAP IdF en Île-de-France depuis bientôt cinq. Depuis le temps que je pratique le système et que j’en vante les mérites, à toutes les sauces, devant tous les publics, en toute saison, je dois reconnaître que je ne m’en lasse pas, ni de mon panier, ni d’en parler. On le sait, les AMAP, c’est bien plus qu’un panier, c’est le partenariat qui se noue, c’est le visage qu’on met sur son légume et qui nous permet de respecter celui ou celle qui l’a cultivé, comme celui ou celle qui va le manger.

Faire pousser et faire cuire, désherber et découper, semer et assaisonner sont les deux faces d’une même action nourricière qui nous raccroche tous et toutes à la terre et au vivant. En fait, les AMAP nous rendent plus terrestres, et nous rappellent l’humus qu’il y a dans l’humain.

S’engager dans un partenariat en AMAP, c’est cultiver ensemble le partage et le lien, c’est refaire du commun. Sophie, ma maraîchérie dit toujours qu’elle fait pousser nos légumes : ce ne sont pas les siens, et d’ailleurs ce n’est pas son jardin, ce sont les légumes et le jardin que nous partageons, que nous avons en commun, et dont nous prenons soin.

On partage la récolte, mais aussi les livraisons, un verre, nos humeurs et nos expériences, nos souvenirs et nos inquiétudes. Et Dieu que ça fait du bien. Ce petit sentiment d’appartenance, ce petit moment de retrouvailles, qui nous fait nous sentir en vie, qui ravive notre énergie et qui revivifie aussi les territoires : ceux de lieux de culture et des lieux de partage, qui ne sont pas les mêmes mais servent le même but. Partout où se retrouvent des gens animés de la volonté de savoir, de connaître et de comprendre. Comment ça pousse, comment ça va, comment on fait.

Parmi les innombrables bénéfices du système AMAP, l’un des plus patents est bien cette envie de transparence qui fait que l’on peut se sentir concerné, que l’on peut s’intéresser, et qui met fin au règne incontesté des experts. Parce qu’avec les légumes, ou le pain, ou les œufs, ou les fruits, ou le miel, circule aussi de la connaissance. [….]

Pour celles et ceux qui mangent comme pour celles et ceux qui cultivent, on doit pouvoir affirmer que les AMAP sont un mouvement. Un mouvement émancipateur, libérateur, un mouvement pour l’autonomie de celles et ceux qui choisissent de se sentir concernés par le destin commun de l’agriculture et de l’alimentation. La base, quoi. »

Retour en haut