Cycle d’échanges entre paysan·nes en AMAP #4 : être paysan·nes en AMAP, c’est un choix que je souhaite défendre !

Pour ce quatrième échange, des paysan·nes en AMAP se sont retrouvé·es pour partager plusieurs questionnements : quel sens politique donnent-ils/elles à leur projet en AMAP ? Quelle forme prend-il au quotidien ? Comment le partagent-ils/elles plus largement : au sein de leurs AMAP, dans leurs échanges entre pairs et/ou réseau d’AMAP ? Comment articuler temps de production sur la ferme et militantisme ?

L’engagement militant en AMAP

L’engagement militant de paysan·ne en AMAP peut prendre différentes formes, que ce soit à l’échelle de la ferme dans son quotidien, de l’AMAP, du territoire, ou plus largement encore. L’engagement peut être vécu comme une manière supplémentaire de donner sens et cohérence à son activité, à condition de trouver le bon équilibre entre temps de travail, temps personnel et temps militant. Encore que, être en AMAP, n’est-ce pas déjà un acte militant ? Partagé avec les amapien·nes, le sens de cet engagement militant devient une réelle force et nourrit les liens entre paysan·ne et amapien·nes, qui seront alors mieux préparé·es pour se mobiliser en cas de coup dur à la ferme ou pour participer à des actions de défense de l’agriculture paysanne.

« Être en AMAP, c’est être militant » ?

Florent S., paysan en Ile-de-France et porte-parole du Miramap, témoigne de ses engagements militants du moment, qui oscillent entre des temps d’échanges entre paysan·nes, des temps qu’il réserve aux AMAP et à l’action syndicale, et celui dédié à la préparation d’un débat en vue des élections législatives.

Pour Clément, maraîcher près du Havre, une distinction est à faire entre la transmission (telle qu’il peut y en avoir avec l’accueil du public sur la ferme ou de stagiaires agricoles qu’il forme) et le militantisme, qui fait nécessairement sortir du périmètre de la ferme. Un militantisme qu’il dit, par ailleurs, compliqué à organiser si l’on est seul·e sur sa ferme.

Romain quant à lui s’interroge sur comment partager plus fortement ses valeurs et engagements alors qu’avec ses associés, ils ne sont pas ‘100% AMAP’. Assurer quotidiennement un niveau de production les pousse à considérer leurs AMAP comme un débouché parmi d’autres, même s’ils participent aux AG, vont aux réunions, etc. Vient aussi s’ajouter une question de temps à accorder à un groupe quand il y a deux livraisons d’AMAP le même soir avec l’enjeu aussi de raisonner les coûts de livraison, qui plus est quand la ferme est éloignée…

En fait le tout premier échelon d’engagement est de contribuer à faire vivre le partenariat AMAP et jouer son rôle dans la sensibilisation des amapien·nes au travail et à la vie paysanne. Ce volet d’éducation populaire est la clé de voûte de la construction du militantisme en AMAP. A force de le développer, Clément en est d’ailleurs arrivé aujourd’hui à publier un livre ‘La lune, la laitue et moi’, une cinquantaine de chroniques qui explorent son cheminement pour résoudre les problèmes concrets qui se posent dans sa production bio, et ses questionnements sur l’agriculture paysanne. L’idée de départ était militante, avec l’envie de faire passer et d’expliquer les pensées qu’il n’avait pas le temps de développer pendant les livraisons à l’AMAP.

Temps de travail et/ou temps militant ?

Comment calculer son temps de travail et son temps militant ? Les deux sont-ils nécessairement à distinguer ? La question s’est posée pendant cet échange, et la réponse est loin d’être homogène tant les pratiques et les réalités de chacun·e sont différentes.

Alors que Romain travaille sur une ferme de 8 salariés permanents, la participation aux AG des AMAP par exemple relève du temps personnel de deux de ses associés. Florent S., qui travaille également avec deux associés, sépare en revanche temps militant ‘individuel’, qui est choisi et compté sur son temps personnel, et temps militant ‘agricole’, inclus dans son temps de travail car il contribue nécessairement à la ferme. Pour ces temps-ci, une concertation se fait généralement en amont afin de décider collectivement quelles actions militante prioriser.

Clément n’a pas d’associé et n’a pas de compte à rendre sur son temps de travail, mise à part vis à vis de sa famille. Il considère que les réunions à l’AMAP ou dans les réseaux d’AMAP, son implication dans des organisations professionnelles et certains chantiers participatifs font partie intégrante de son temps de travail. Reste certaines zones grises telles que des fêtes d’AMAP ou du réseau, qui combine pour lui promotion de l’AMAP et moment convivial « pour se faire plaisir ».

Florent V., éleveur de poules pondeuses et producteur de raisin de table, travaille seul sur sa ferme. N’ayant pas de temps dédié aux réunions entre associés, il peut mettre ce temps de travail de côté pour son engagement militant, qu’il répartit entre deux associations : de 4 à 5 jours par an pour l’une, à 1 journée par semaine pour Les AMAP de Provence où il est porte-parole… dont le samedi ! La vie professionnelle et personnelle n’a pas toujours de frontière.

Avant de se quitter, Florent S. constate que cette discussion n’a été qu’entre paysans. Et l’engagement des paysannes ? Une invitation à organiser un rendez-vous entre ‘pairEs’…

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