Vous le voyez bien, dans les fermes, l’accélération des phénomènes climatiques est déjà là depuis quelques années. Nous connaissons des pertes de production à cause d’évènements extrêmes : inondations, sécheresses, canicules, tempêtes, grêle, gel sur floraisons précoces. Les mangeur·ses en AMAP adaptent déjà leur alimentation aux pertes de production des fermes locales selon les principes de base de solidarité du partenariat en AMAP.
Le vécu des paysan·nes et les analyses de la science concordent : la récurrence des évènements violents n’est pas anodine, c’est une tendance lourde, ce ne sont pas seulement des évènements isolés qu’on peut encaisser au coup par coup. Les aides financières de réparation ne peuvent pas suffire, prévenir les pertes récurrentes est devenu indispensable. Les AMAP apportent souvent le soutien citoyen dont ont besoin les fermes pour être plus robustes et plus résilientes, mais face à l’augmentation des évènements climatiques actuels cela ne suffit pas toujours, hélas.
En avril, avec trois ONG et dix autres « sinistrés du climat », le MIRAMAP a attaqué l’État en justice pour inaction sur la question de l’adaptation au changement climatique. L’idée de ce recours est de mettre en lumière l’insuffisance des mesures du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique 3 (PNACC 3). Tout en reconnaissant que l’agriculture est cruciale pour la sécurité alimentaire de la population, ce plan manque totalement d’ambition sur des questions telles que l’eau et l’accompagnement à une transition agricole. Les mesures se limitent à des études et des diagnostics sans véritable financement. Dans aucun domaine, le PNACC3 ne garantit l’adaptation d’une France à +4°C en 2100. Seule une adaptation « transformationnelle » pourrait garantir la protection des populations face à l’aggravation des impacts du changement climatique sur notre agriculture et notre alimentation.
En parallèle de cette action nationale du MIRAMAP, nous, dans les AMAP, nos réseaux et nos fermes, devons agir là où nous avons le plus de pouvoir : au niveau local. Les mesures nécessaires à l’adaptation de l’agriculture ne doivent pas être à la seule charge des fermes qui nous nourrissent mais portées par les habitant·es et les collectivités locales car le maintien de terres nourricières relève de l’intérêt général.
Incitons les communes, les intercommunalités, les métropoles, les villes à soutenir l’adaptation des fermes. Beaucoup peut être fait en aidant à créer des infrastructures agro-écologiques (création de haies, mares, nichoirs, plantation d’arbres), en aidant à établir des diagnostics de vulnérabilité des fermes aux impacts du changement climatique en fonction du futur climat local, en soutenant l’installation de nouveaux paysan·nes, en développant la création de Maison des Semences Paysannes, de Maison de l’Alimentation ou encore de fermes municipales.
Les collectivités locales pourraient chercher des financements afin de soutenir la stratégie économique de diversification des productions locales et la transformation des produits sur les fermes. Elles pourraient soutenir l’alimentation bio, locale et de saison par la restauration collective publique, renforcer l’accessibilité de toutes et tous à une alimentation saine, encourager les changements d’habitude des consommateurs en leur permettant de retrouver le plaisir simple de manger des produits frais, locaux, goûteux et de saison selon les multiples recettes qui circulent dans les AMAP et ailleurs.
Les AMAP doivent relever le défi de cette nouvelle crise insidieuse. L’atténuation des phénomènes est fondamentale mais l’adaptation l’est tout autant désormais. Il est indéniable que nous sommes confrontés à une crise anxiogène qui pousse au déni tant elle touche à notre mode de vie. Rester dans le déni et l’inaction ne change pas le problème et ne nous prépare pas à faire face aux difficultés. Nous sommes depuis toujours des territoires d’expérimentation qui construisons des solutions pour la résilience des fermes nourricières. Les élections municipales de 2026 seront l’occasion de peser dans ce sens. Rassemblons nous et montrons la force d’un mouvement citoyen de transformation sociale et écologique dans nos communes et nos régions.
– Evelyne, Florent, François, Mireille et le collectif du MIRAMAP