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Une cagnotte solidaire à Aubenas

Les dérives d’un capitalisme financier poussé au bout de ses contradictions ont conduit à une remise en cause des acteurs bancaires traditionnels et à un assèchement du crédit. Dans le bouillonnement de l’économie solidaire, des citoyens ont alors adopté les méthodes des finances alternatives pour répondre eux-mêmes aux enjeux financiers locaux. C’est le cas d’Emmanuel et de ses amapiens à Aubenas.

Après avoir travaillé dans l’animation puis comme éducateur à Poitiers, Emmanuel s’est installé en Ardèche avec 10 000 euros, un microcrédit fait à l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie). Privé dans un premier temps des aides d’État pour cause de surface d’exploitation trop petite, il empruntait le tracteur d’un paysan voisin, qui l’a aidé à s’installer. Il finit par obtenir la Dotation Jeune Agriculteur (DJA) et fait deux emprunts bancaires pour financer du matériel.

Une réponse concrète aux besoins des paysans

A l’automne 2012, le maraîcher prend la décision d’acquérir une serre d’occasion pour mieux maîtriser le climat, avoir un meilleur rendement et pouvoir ainsi offrir à ses amapiens plus de légumes en hiver et au printemps. L’investissement s’élève à 3 000 euros. Ayant déjà effectué deux emprunts bancaires, Emmanuel ne souhaitait pas faire de nouveau appel à sa banque, et éviter de payer des taux d’intérêt élevés pour un montant si faible. Il évoque le sujet avec les amapiens.

Les séances hebdomadaires de distribution des paniers deviennent dès lors des moments de concertation et d’organisation pour faire avancer le projet. Quelques amapiens se chargent de recenser les possibilités d’apports de chacun. En lien avec le MIRAMAP et le réseau régional Alliance PEC Rhône-Alpes, une réflexion est menée pour lever les obstacles techniques et juridiques.

Un modèle simple et adaptable

Concrètement, procéder avec des reconnaissances de dette individuelles risquait d’entraîner une gestion compliquée. L’idée de créer une cagnotte solidaire a alors émergé.

Une association a été créée et Stéphane, le trésorier de l’AMAP, a recensé ce que chacun pouvait prêter. Des bons de souscription de 25 euros ont été mis en place, en laissant le choix à chacun d’en prendre le nombre qu’il veut. Depuis cinq ans qu’Emmanuel a commencé à travailler en AMAP, une relation de confiance s’est instaurée. Grâce à cette relation de confiance, les gens étaient très enthousiastes et ont tout de suite participé.

L’AMAP a également prêté 700 euros sur les reliquats d’adhésion des années précédentes. On a donc récolté collectivement 3200 euros. En moyenne, chacun a prêté 75 euros. Avec ce modèle de cagnotte, Emmanuel devra rembourser 100 euros par mois et ne paiera pas d’intérêt.

« La cagnotte s’est montée presque naturellement. Cela a permis de renforcer les liens de solidarité, d’impliquer les gens. En étant dans une AMAP, on n’achète pas que des légumes, on s’engage. C’est un peu leur serre maintenant. »

En février 2013, les statuts de la cagnotte solidaire Aubenas sont déposés et les premiers fonds apportés. Du simple outil financier qu’elle était initialement, la cagnotte devient un espace de démocratie, un levier au service d’un changement de paradigme.