Agir pour une agriculture alternative
mouvement interregional des Amap
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Réflexions à partager pour nos actions de mobilisation à venir

Comment permettre aux citoyens de notre mouvement (amapiens et paysans en AMAP) de se saisir davantage des enjeux sociétaux contemporains et être davantage en capacité d’agir ? Comment renforcer notre mouvement pour répondre concrètement aux problèmes agri-alimentaires actuels et engager des actions collectives de changements perceptibles ? Comment « être ni trop cynique, ni trop idéaliste » et « concilier efficacité et démocratie » ?

En parallèle des travaux menés dans le cadre des mobilisations des AMAP pour le Village Mondial des Alternatives, plusieurs temps d’échange et de réflexions ont été organisé pendant l’année 2015 autour de ces questionnements et être force de propositions pour l’avenir.

Retour d’expériences et partage de réflexions, par Magali Jacques, animatrice au Miramap

Basées sur une conception de partage, les AMAP visent à une transformation sociale et écologique de l’agriculture et de notre rapport à l’alimentation en générant de nouvelles solidarités. Elles sont des alternatives concrètes qui émergent de la société civile.  »
Préambule de la nouvelle charte des AMAP 2014

Alors que la fin d’année 2015 a été marquée par une actualité plutôt sombre, attentats, élections régionales en tension, COP 21, comment permettre aux citoyens de notre mouvement (amapiens et paysans en AMAP) de se saisir davantage des enjeux sociétaux contemporains et être davantage en capacité d’agir ?
Comment renforcer notre mouvement pour répondre concrètement aux problèmes agri-alimentaires actuels et engager des actions collectives de changements perceptibles ?
Comment « être ni trop cynique, ni trop idéaliste » et « concilier efficacité et démocratie » [1] ?

Des questions au cœur des journées d’échanges du Miramap en 2015

En février 2015 à Avignon , lors d’un atelier, les participants ont réfléchi à la question : ‘les AMAP peuvent-elles transformer la société ? [2]. Par la suite, un temps de travail consacré à ‘L’éducation populaire, un outil au service de la transformation sociale’ lors de la rencontre inter-salariées de juillet 2015, a permis d’explorer davantage les notions de transformation sociale, d’émancipation, et d’éducation populaire dans le mouvement des AMAP. La réflexion a été menée autour de 2 questions : Quelle est la place du mouvement des AMAP dans la société ? Les AMAP sont elles de vrais espaces d’éducation populaire et de transformation sociale ?

Dans la continuité, en septembre 2015 à Lille , les membres du Collectif du Miramap et des amapiens lillois ont été invités à réfléchir aux différentes formes de mobilisations collectives.

S’appuyant sur les récits d’expériences du Réseau des AMAP d’Ile de France dans la cadre de sa campagne de mobilisation et de plaidoyer ‘Tous dans le même panier’ et d’ATD Quart Monde Lille sur ses actions de lutte contre la pauvreté basé sur un travail du quotidien autour du dialogue, de la compréhension mutuelle, la recherche de croisement des savoirs et la montée en capacités collectives, nous avons alors dessiné des pistes de réflexion et d’action pour le mouvement des AMAP – dans la continuité des orientations de l’AG2015- pour autant renforcer nos capacités de conscientisation et de mobilisation des AMAP que d’interpellation des responsables (voir encadré ci dessous).

Et c’est lors de ce week end, que nous avons lancé le travail pour un APPEL A MOBILISATION DES AMAP pour le Village Mondial des Alternatives !
Voir le chantier 2015 >>> ici

« Faire comprendre aux citoyens qu’ils peuvent agir » ou « permettre que les citoyens puissent comprendre et agir » ?

Les enseignements de cette après midi lilloise ont été nombreux et nous ont permis de réaffirmer l’importance de concevoir les AMAP comme un mouvement citoyen, l’objectif de se faire entendre, de rechercher davantage une sensibilisation des amapiens aux questions politico-économiques actuelles et notamment dans le domaine agricole, de l’aménagement du territoire, etc. et de faire comprendre que les citoyens peuvent agir, qu’ils peuvent interpeller leurs élus, faire entendre leur voix dans des lieux de décisions, etc.

Des centaines d’AMAP et leur réseaux territoriaux se sont engagés depuis de nombreuses années dans des démarches d’éducation populaire en sensibilisant leurs membres, en soutenant l’installation de nouveaux paysans, en développant des partenariats avec les autres acteurs de la société et en diffusant les valeurs des AMAP autant auprès du grand public que des décideurs. L’analyse critique et l’action collective sont le terreau des AMAP.

Fort de ces expériences, nous sommes aussi conscients du chemin qu’il y a encore à parcourir.
On entend régulièrement, les amapiens ne s’impliquent pas assez dans la vie des AMAP et des réseaux, il y a une dérive consumériste, etc. Si certains exemples pourraient venir le confirmer, ne regardons pas seulement le verre a moitié vide ! Il s’agit alors de plutôt s’interroger : dans quelle mesure les AMAP, les réseaux d’AMAP et le Miramap peuvent-ils proposer davantage de lieux d’échanges, de discussion, d’apprentissage collectif entre amapiens et paysans et, aussi avec d’autres ? Pour résumer, comment développer encore plus de processus collectifs émancipateurs ?

A l’heure où les AMAP sont à un tournant, c’est sans doute en creusant ce champ de réflexion, d’action et d’expérimentation que le mouvement des AMAP trouvera des éléments de réponses à ses ambitions collectives.

Lors de cette rencontre à Lille, nous avons parlé d’éducation populaire, d’organiser des forums citoyens, de créer de nouveaux espaces de dialogue, de renforcer le ‘réfléchir et construire ensemble’, venant ainsi compléter et enrichir les actions que déploient déjà certains réseaux pour accompagner à l’amélioration des pratiques par des démarches participatives (de type évaluation participatives, SPG, DPP - voir la rubrique dédiée).

Quels liens entre les démarches d’évaluations participatives et les mobilisations citoyennes ?

Nous le savons, la clé est dans le renforcement de ces démarches de fond, et le défi est aujourd’hui de les inscrire davantage dans un processus collectif, structuré dans la durée.

Les liens entre les démarches d’évaluation participative, les mobilisations citoyennes et la construction de plaidoyer ne sont pas toujours évidents à faire dans la mesure où une action de mobilisation et de construction d’un plaidoyer peut s’inscrire dans un temps court, liée souvent à un évènement (les élections régionales, la Cop 21), il y a donc souvent une échéance ! Alors que nous savons tous que l’accompagnement des partenariats AMAP via des visites SPG, SGP où des temps de questionnement, réflexion collective, de diagnostic partagé sur nos pratiques appellent à prendre le temps.

Est-ce pour autant incompatible ? Au contraire. Plus les lieux d’interconnaissance et d’apprentissage commun se développeront, plus les capacités collectives d’action et d’interpellation grandiront ! L’enjeu est alors de faire en sorte que ces savoirs communs alimentent l’ensemble du mouvement …

Un groupe de travail nommé ‘pratiquesetethique’ réunissant des membres de 7 réseaux territoriaux a été créer pour échanger sur les démarches et recherches de chacun dans ce domaine.

Faire un pas de coté et s’inspirer des formes de mobilisations innovantes pour renforcer nos actions

C’est aussi en faisant un pas de coté et en allant à la rencontre d’autres organisations, mouvements et initiatives qui expérimentent et développent de nouvelles formes de mobilisations citoyennes que nous pouvons envisager l’expérimentation d’approches et méthodes innovantes.

De nombreux chercheurs et praticiens s’accordent à dire que c’est cherchant à comprendre comment vivent, agissent et s’organisent les personnes les plus fragilisées que l’on apprend sur soi et la société dans laquelle on vit et que l’on peut tirer de nombreux enseignements pour construire des actions collectives incluant le plus grand nombre.

Plusieurs sources d’inspiration, ‘extérieures’ au mouvement des AMAP alimentent et pourront alimenter nos réflexions : les récits d’expériences françaises et étrangères construites sur le modèle du ‘community organizing’, recueillis dans l’ouvrage Agir en Démocratie d’Hélène Balazard ou encore l’ouvrage coordonné par Françoise Garibay et Michel Séguier ‘Pratiques émancipatrices, actualités de Paulo Freire’, sont riches en enseignements sur les interactions : ‘besoin-vouloir-savoir-pouvoir’, mécanique fondamentale de l’émancipation.

En septembre à Lille, Catherine de Schauenburg, volontaire permanente ATD Lille, nous a longuement parlé de l’importance des croisements des savoirs et nous a présenté les universités populaires Quart Monde. S’il existe différents types d’universités populaires en France, nous avons retenu celles du Quart Monde, dans la mesure où la démarche se veut très participative, contrairement à d’autres formes d’universités populaires, et une priorité est portée à l’expression des ‘sans voix’. (Voir encadré ci dessous)

Les Universités Populaires d’ATD Quart Monde : une source d’inspiration pour renforcer le croisement des savoirs et le dialogue
ATD Quart monde est un mouvement national et international de lutte contre la pauvreté dont une de leur action est l’organisation d’universités populaires Quart Monde : des lieux de dialogue et de formation réciproque entre des adultes vivant en grande pauvreté et d’autres citoyens qui s’engagent à leurs côtés.

Catherine de Schauenburg, volontaire permanente ATD Lille, nous a présenté la méthodologie qu’ils proposent : tous les 2-3 mois ils envoient à tous les groupes une invitation présentant le thème de travail et quelques questions liées. Les groupes se réunissent et préparent le sujet. C’est alors par des méthodes d’animation très diverses (photo-langage, expression de vécu, etc.) que le groupe va alors co-construire une réflexion et aussi préparer la forme de restitution de son travail. C’est généralement l’occasion de travailler la prise de parole et ainsi permettre à celles et ceux qui ne la prennent jamais d’être en confiance et d’oser parler.

L’université populaire est le rassemblement de ces différents groupes qui restituent leurs réflexions et travaux. Sont aussi invités des partenaires (élus, fonctionnaire, spécialistes) liés à la thématique : ces derniers ne sont pas associés à ces rencontres pour exposer leurs savoirs mais pour entendre les participants et dialoguer avec eux.

L’université populaire devient alors un espace d’expression et de débat.
Les comptes rendus des ateliers préparatoires, puis de ce ‘forum’ sont alors diffusés à tous. Et l’université suivante est organisée avec des membres de chaque groupe.

Plus d’info : http://atd-quartmonde.org/l-universite-populaire-quart-monde3199/

Les méthodes paraissent, au premier abord, simples : poser des questions autour d’une thématique, inviter des groupes à les préparer, se réunir, associer des personnes extérieures mais concernées par les questions, en discuter, garder en mémoire. Certes.
Par contre, les maintenir dans la durée en les inscrivant dans des chantiers plus grands de mobilisation, permettant alors que ces expériences et savoirs communs nourrissent un mouvement et contribue aussi à alimenter des propositions de transformation sociale et des politiques publiques, c’est encore autre chose !

L’objectif n’est pas de faire des copier-collers mais bien de s’inspirer de ces expériences pour renforcer nos actions sur les territoires.