Les SPG sont au cœur projet de coopération européenne EAtingCRAFT qui a démarré fin 2017. Miramap et Nature et Progrès sont les deux structures françaises partenaires, une bonne occasion de travailler en collaboration sur un axe de travail central pour le mouvement des AMAP. Nous vous proposons dans cet article un détour historique pour resituer l’action d’aujourd’hui et construire les mois à venir.
Lire la présentation du projet., Lire La Déclaration européenne des CSA – l’Agriculture Soutenue par les Citoyens
Comment encourager la transition agricole et alimentaire dans notre société ? Quelle place ont les paysans et les mangeurs dans ces changements ? Et comment agissons-nous dans nos propres organisations pour bâtir et renforcer ses transformations agricoles, alimentaires, écologiques, et sociales ? Des questions qui nous rassemblent aujourd’hui et notamment en interrogeant les Systèmes Participatifs de Garantie et leurs liens, adaptations et articulations possibles avec les AMAP et plus largement dans le cadre de Partenariats Locaux et Solidaires qui se développent dans d’autres pays.
Il parait important de revenir sur certains moments de l’histoire récente de notre mouvement des AMAP (en se risquant peut-être parfois à quelques raccourcis) et s’appuyer sur nos fondamentaux pour mieux comprendre les questions qui nous animent aujourd’hui.
Quels valeurs et objectifs partagés entre les SPG et les CSA ?
Partout dans le monde, des fermes biologiques, des consommateurs et des organisations d’animation locale ont développé des démarches alternatives à la certification par des organismes tiers, alternatives que l’on nomme les Systèmes participatifs de Garantie ou encore des initiatives s’en inspirant dans les CSA.
Les SPG et CSA ont de grandes convergences dans leurs objectifs : permettre que les fermes biologiques soient viables et vivables et rendre accessible à tous une alimentation de bonne qualité gustative, sanitaire et environnementale.
Les uns comme les autres, les SPG et les CSA portent des principes de transparence et de partage des prises de décisions en privilégiant une démarche de solidarité dans laquelle la responsabilité pour la transformation des pratiques agricoles vers une agriculture soutenable est partagée par ’la communauté’.
La participation active de leurs membres est aussi une base commune.
Quels liens entre les SPG et le mouvement des AMAP ? Récit des antécédents*
Il y a environ 10 ans, les AMAP se développent très fortement partout en France et dans certains territoires en particulier grâce à l’essaimage organisé au sein des réseaux locaux - les Alliances PEC (Paysans, Écologistes et Consommateurs). Très rapidement, plusieurs facteurs vont conduire Alliance Provence, puis en 2010 Alliance PEC Rhône-Alpes a développé, adapté et expérimenté leur propre démarche de SPG au sein de leur réseau.
L’identification de manques et besoins spécifiques au fonctionnement en AMAP : le besoin de s’outiller pour accompagner le développement du réseau d’AMAP en s’appuyant et défendant l’éthique des AMAP portée par la charte des AMAP
le besoin d’apporter des réponses aux constats de difficultés que rencontrent les AMAP et notamment en termes de communication entre le groupe d’amapiens et les paysans en AMAP : des manques de dialogue et de transparence réciproque sources d’incompréhensions mutuelles voire de conflits
des manques d’échanges de pratiques et d’entraide entre groupes d’amapiens d’une part et entre paysans en AMAP d’autres part.
A ces besoins, s’ajoutent plusieurs autres éléments clés. A l’époque, il y a de fortes tensions en interne au réseau Alliance Provence sur la place de la bio dans les AMAP : nécessité ou non de la certification AB pour être ‘paysans en AMAP’ ?
De plus, étant donné que la marque AMAP a été déposée à l’INPI (Institut National de la Propriété Intellectuelle) pour protéger le terme AMAP de récupérations mercantiles, il était donc important d’engager des moyens dans le mouvement pour accompagner le respect de la Charte des AMAP – ce qui est défini dans la charte des AMAP 2014 comme ‘l’amélioration continue des pratiques en AMAP’.
Les interviews menées en 2014 auprès de certains militants de ces réseaux nous rappellent qu’il y avait besoin d’accompagner collectivement le développement des AMAP dans leur rôle de soutien aux revenus des paysans ainsi que dans leur conversion vers l’agriculture biologique.
Souvenons-nous aussi du contexte politique de la société de l’époque avec le ‘verdissement’ de tous secteurs de l’économie et la démultiplication de labels et autres signes de qualité. A cette période ont lieu de vifs débats sur le label AB et la question de l’alignement de ses critères sur le label bio européen ‘eurofeuille’, moins contraignant que le label AB initial. Dans ce contexte, 8 organisations dont Nature et Progrès, Minga ou Alliance Provence, signent en 2008 un appel pour des systèmes participatifs ‘Contre la consommation dirigée, pour une démarche citoyenne’, texte qui critique la récupération et le détournement des termes d’agriculture biologique, commerce équitable, textile écologique et d’écoconstruction, dont ‘l’attribution des logos qui leur correspondent dépend d’une expertise spécialisée nommée certification’.
Je vous invite vivement à relire ce texte ressorti de nos archives, tout en gardant bien en mémoire son contexte et l’idée qu’il ne s’agit pas ici de dénigrer l’intérêt que peut avoir une labellisation. Ce document porte en lui une invitation forte à la réappropriation collective des méthodes pour faire évoluer les fermes et les comportements de consommation.
Et ensuite ?
C’est dans ce contexte général que sont nés les premiers SPG en AMAP en Provence et en Rhône-Alpes en s’appuyant sur la démarches de SPG portée par Nature et Progrès, et en s’inspirant du diagnostic de l’Agriculture Paysanne de la Fadear ou encore des outils de diagnostics de conversion AB. En effet il s’agissait alors d’imaginer démarches et des outils adaptés aux spécificités du partenariat en AMAP : que se passe-t-il sur la ferme ? Comment fonctionne le groupe d’amapiens ? Comment comprendre, et surtout comment faire le point sur le partenariat entre un groupe et un paysan ? Comment avancer, s’améliorer collectivement ?
Dès lors des dizaines et dizaines de visites participatives de fermes ont été expérimentées, accompagnées de paysans de la même filière et d’amapiens. Des grilles de questionnaires ont été créées, testées, remaniées. Ces démarches ont plus ou moins bien été acceptées par des paysans ou amapiens pouvant être perçues comme du contrôle, questionnant alors autant les postures des visités que des visiteurs ou des organisateurs. De nombreux débats ont eu lieu… Pour autant, les échos que l’on peut avoir aujourd’hui de ses travaux sont plutôt très positifs car il y a des rencontres, des échanges, du questionnement, des débats, une recherche de compréhension mutuelle, de mieux s’organiser, d’avancer, construire…
Et aujourd’hui ?
En 2014, un état des lieux interrégional a permis de recueillir ces expériences et d’en retirer des enseignements. Toutes les conclusions sont
disponibles en lignec. Entre 2015 et 2016, de nouveaux outils pédagogiques réalisés par chacun ont été partagés.
Depuis, il y a eu encore des évolutions. Certains réseaux continuent leurs travaux d’accompagnement via des visites d’évaluation participative en mettant l’accent sur les visites de démarrage de partenariats en AMAP pour établir des bases d’interconnaissance solide pour la pérennité du partenariat AMAP. Le réseau Les AMAP de Provence a développé un réseau d’entraide entre paysans ‘PaysAMAP’.
D’autres mettent à disposition des outils pour que les AMAP se saisissent par elles-mêmes de ces démarches avec des outils d’autodiagnostic ou encore privilégient l’organisation de formation pour renforcer les capacités collectives pour agir en AMAP. Les principes d’éducation populaire restant au centre de l’action.
4 ans après cet état des lieux, où en est-on exactement ? Ce projet de coopération européenne est un cadre pour structurer aujourd’hui de nouvelles capitalisations des expériences. Le projet de site ‘espace ressource en AMAP’ en construction permettra quand à lui de rendre visible et accessible à tous les méthodes et outils pédagogiques pour cheminer dans son AMAP, son réseau…
à bientôt,
Magali Jacques, animatrice au Miramap
*Enquête menée en 2014 par le Miramap ‘Rapport d’activités et enseignements : Chantier 2014 Amélioration des pratiques et paysan-ne-s en AMAP, Garantir l’éthique et la soutenabilité sociale, environnementale et économique des partenariats AMAP par la mobilisation des systèmes participatifs de garantie, juin 2015’ http://miramap.org/SPG-SGP-DPP-des-ressources-sur-les.html